mpo

La crise sécuritaire dans les pays de l’AES : une menace pour l’équilibre du Sahel

La situation sécuritaire au Sahel continue de se détériorer, particulièrement dans les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) – le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Confrontés à une montée en puissance des groupes djihadistes, ces États doivent faire face à une crise qui menace non seulement leur stabilité, mais aussi celle de toute la région.

Une insécurité grandissante

Depuis plusieurs années, les groupes terroristes comme le Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans (GSIM) et l’État Islamique au Sahel (EIS) multiplient les attaques contre les forces armées et les populations civiles. Embuscades, attentats à la bombe, enlèvements et massacres sont devenus monnaie courante, mettant à rude épreuve les efforts sécuritaires des gouvernements concernés.

Rien qu’en janvier et février 2025, plusieurs attaques de grande ampleur ont été recensées, ciblant aussi bien des camps militaires que des villages entiers. Les conséquences sont dramatiques : des milliers de personnes déplacées, des infrastructures détruites et une économie locale paralysée.

Des armées locales dépassées

Malgré des opérations militaires menées par les forces de l’AES, les armées nationales peinent à contenir la menace. Manque de moyens, insuffisance de coordination et désertions fragilisent les dispositifs de défense. Le retrait des forces internationales, notamment françaises et onusiennes, a accentué cette vulnérabilité, laissant un vide sécuritaire exploité par les groupes terroristes.

Face à cette situation, les autorités de l’AES prônent une stratégie d’autonomie militaire, axée sur le renforcement des capacités nationales et la coopération entre les trois pays. Toutefois, l’efficacité de cette approche reste à prouver dans un contexte où les groupes armés gagnent du terrain.

Les populations en première ligne

Si les forces armées sont en difficulté, ce sont surtout les populations civiles qui paient le prix fort. Les attaques visent souvent des villages, forçant des milliers de familles à fuir leurs terres. Les écoles et les centres de santé sont détruits, aggravant une crise humanitaire déjà alarmante.

Les organisations humanitaires peinent à intervenir dans certaines zones en raison de l’insécurité, rendant l’accès aux soins et à l’aide alimentaire de plus en plus difficile. Le Sahel est ainsi confronté à une double crise : sécuritaire et humanitaire.

Un avenir incertain pour le Sahel

Face à cette montée de l’insécurité, plusieurs questions restent en suspens. L’Alliance des États du Sahel sera-t-elle en mesure de restaurer l’ordre et de sécuriser durablement ses territoires ? La coopération régionale et internationale suffira-t-elle à enrayer la progression des groupes armés ?

Si des initiatives comme le renforcement des armées locales et la mise en place de nouvelles stratégies de lutte contre le terrorisme sont en cours, la stabilité du Sahel dépendra avant tout de la capacité des gouvernements à répondre aux défis socio-économiques et sécuritaires qui alimentent ces conflits.

L’urgence est donc d’adopter une approche globale combinant sécurité, développement et gouvernance pour espérer endiguer cette crise qui menace l’équilibre de toute la région.

mine dor de Kiaka

Barrick Gold au Mali : Entre croissance des réserves et tensions politiques, l’avenir incertain de Loulo-Gounkoto

Barrick Gold, géant minier canadien, renforce sa présence en Afrique avec cinq mines d’or clés, dont le complexe malien Loulo-Gounkoto, au cœur d’un litige croissant avec les autorités de Bamako. Alors que la production africaine de Barrick a atteint 1,5 million d’onces en 2023, dont 36 % provenaient de Loulo-Gounkoto, les réserves du groupe dans la région Afrique et Moyen-Orient ont continué de croître, passant de 17,69 millions d’onces en 2022 à 19 millions en 2024 11. Cette augmentation repose en grande partie sur l’extension des gisements à haute teneur de Yalea, un puits souterrain du complexe malien, dont les réserves sont passées de 6,7 à 7,3 millions d’onces entre 2022 et 2024, avec une teneur en or améliorée à 4 g/t 11.

Un actif stratégique sous pression politique

Le Mali, qui abrite plus d’un tiers des réserves africaines de Barrick, est désormais le théâtre d’un bras de fer entre le gouvernement et la multinationale. Depuis 2023, Bamako exige une révision des termes du partenariat, réclamant une augmentation de sa participation dans Loulo-Gounkoto de 20 % à 30 %, conformément au nouveau code minier adopté en 2023 11. Le ministre malien des Finances, Alousséni Sanou, a menacé de ne pas renouveler le permis d’exploitation de la mine, qui expire en 2026, si Barrick refuse d’appliquer ces modifications 11.

Cette tension s’est exacerbée en janvier 2025 lorsque les autorités maliennes ont saisi près de 3 tonnes d’or (évaluées à 245 millions de dollars) sur le site de Loulo-Gounkoto, invoquant des arriérés fiscaux présumés de 5,5 milliards de dollars – un montant faramineux que Barrick conteste vigoureusement 814. En réponse, la société a suspendu ses opérations dans le pays, une décision qui pourrait réduire ses bénéfices de 11 % en 2025 selon les analystes.

Négociations tendues et enjeux régionaux

Les pourparlers, repris fin janvier 2025 après des semaines de blocage, visent à résoudre ce conflit qui s’inscrit dans une tendance régionale : les gouvernements ouest-africains, notamment au Mali, au Burkina Faso et au Niger, renégocient activement les contrats miniers pour accroître leurs revenus, profitant des prix élevés de l’or 8. Barrick, qui nie toute dette fiscale, affirme avoir versé 85 millions de dollars en octobre 2024 dans le cadre des négociations et plaide pour un règlement amiable.

Cyril Mutombo, directeur pays de Barrick en RDC, présent à Mining Indaba 2025, a réaffirmé les efforts de la compagnie pour « progresser vers une résolution » tout en soulignant l’importance de la paix pour les investissements miniers 11. Mark Bristow, PDG de Barrick, a rappelé que le groupe collabore avec le Mali depuis 30 ans et que les différends passés ont toujours été résolus par le dialogue 4.

Implications économiques et perspectives d’avenir

La situation reste fragile. L’application du nouveau code minier malien réduirait la participation de Barrick dans Loulo-Gounkoto à 75 %, avec 5 % supplémentaires réservés aux investisseurs locaux 11. Cette restructuration pourrait affecter les réserves déclarées par la société, actuellement calculées sur une base de 80 % de participation 11. Par ailleurs, la suspension des exportations d’or depuis novembre 2024 et l’insécurité persistante dans l’Est du pays ajoutent une pression supplémentaire sur les opérations.

Malgré ces défis, Loulo-Gounkoto reste un pilier de l’économie malienne, ayant contribué à hauteur de 278 milliards de FCFA (433 millions de dollars) à l’État en 2023. Sa fermeture prolongée menacerait non seulement les finances publiques, mais aussi des milliers d’emplois locaux.

Un équilibre à trouver entre souveraineté et partenariat

Alors que Barrick mise sur l’automatisation et les énergies vertes pour moderniser Kibali (RDC), son avenir au Mali dépendra de sa capacité à concilier les exigences de Bamako avec la viabilité de ses investissements. La résolution de ce conflit sera un test clé pour les relations entre les multinationales minières et les États africains, dans un contexte où la quête de souveraineté économique s’intensifie. Comme l’a déclaré Mark Bristow, « c’est dans la paix que nous partageons les richesses » – un mantra qui devra guider les deux parties pour éviter un effritement mutuellement dommageable 11.

TotalEnergies cède ses activités au Mali

TotalEnergies cède ses activités au Mali : Une nouvelle ère pour le secteur énergétique

Le marché énergétique malien connaît un tournant majeur avec le retrait de TotalEnergies, acteur historique du secteur, et la reprise de ses activités par Coly Energy Mali. Cette acquisition, finalisée en janvier 2025, marque une transition significative, tant pour l’industrie pétrolière du pays que pour les nouvelles ambitions de Bénin Petro SA, société mère de Coly Energy Mali.

Une opération stratégique pour Bénin Petro

Bénin Petro SA, entreprise présente au Bénin, au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Nigeria, consolide ainsi sa présence en Afrique de l’Ouest. En partenariat avec sa société sœur basée en Suisse, Neutron, elle reprend l’ensemble des 80 stations-service de TotalEnergies, tout en garantissant la continuité des services de ravitaillement en carburant pour les secteurs minier et aéronautique.

L’un des points notables de cette acquisition est l’engagement de Bénin Petro à préserver les emplois existants. Plus de 1 100 employés de TotalEnergies au Mali seront conservés, assurant ainsi une transition en douceur et une stabilité pour le personnel ainsi que pour les consommateurs.

Un contexte économique et politique particulier

Si TotalEnergies n’a pas officiellement communiqué les raisons de son retrait après plus de vingt-cinq ans de présence au Mali, plusieurs éléments laissent penser que des tensions avec les autorités locales ont joué un rôle clé. Des observateurs évoquent des pressions fiscales accrues, ainsi que des grèves répétées du personnel, rendant l’environnement des affaires plus complexe pour la multinationale française.

Dans un contexte où le Mali cherche à renforcer sa souveraineté économique et énergétique, cette cession peut être perçue comme une opportunité pour un acteur régional de prendre le relais et d’adapter l’offre aux réalités locales.

Un nouveau souffle pour le marché de l’énergie au Mali

Avec cette transition, Bénin Petro ambitionne de moderniser et d’étendre ses services au Mali. L’entreprise pourrait introduire de nouveaux standards en matière de distribution et d’approvisionnement, en misant sur son expertise acquise dans d’autres marchés africains.

Les stations-service concernées par cette acquisition devraient être rebrandées sous une nouvelle enseigne d’ici 2025, marquant ainsi un changement visible pour les consommateurs maliens.

Le départ de TotalEnergies et l’arrivée de Coly Energy Mali sous l’égide de Bénin Petro SA représentent une transformation majeure pour le secteur énergétique malien. Si des défis subsistent, cette transition ouvre aussi des perspectives pour une meilleure intégration régionale et une dynamique de croissance portée par un acteur africain engagé dans le développement du continent.

AES

Relations CEDEAO-AES : Libre-échange maintenu, mais incertitudes sur les investissements

Fin 2024, l’Alliance des États du Sahel (AES) s’est engagée à préserver la libre circulation avec la CEDEAO. Après le retrait officiel du Burkina Faso, du Mali et du Niger en janvier 2025, la CEDEAO a annoncé le maintien d’une zone de libre-échange avec ces pays « jusqu’à nouvel ordre ». Les citoyens des trois États continueront de bénéficier de la libre circulation, et les biens et services profiteront toujours des avantages commerciaux de la CEDEAO.

Cependant, cette mesure est temporaire, et des discussions sont en cours pour définir les futures relations entre les deux blocs. Le retrait des trois pays soulève des questions sur les investissements, notamment leur participation au capital de la Banque d’investissement et de développement de la CEDEAO (BIDC). En réponse, l’AES prévoit de créer sa propre banque d’investissement pour financer ses projets.

Malgré les tensions, certains pays de la CEDEAO, comme le Ghana et le Bénin, cherchent à maintenir des liens de coopération avec l’AES. Les prochaines réunions ministérielles et sommets des chefs d’État seront déterminants pour l’avenir des relations économiques et politiques dans la région.

MAE

Retrait de la Cédéao : Le Mali, le Burkina et le Niger adoptent une stratégie commune

Les ministres des Affaires étrangères des trois pays sahéliens se sont réunis dimanche à Ouagadougou pour coordonner leur sortie de la Cédéao. L’Alliance des États du Sahel (AES) entend négocier collectivement les modalités de ce retrait.

Abdoulaye Diop, chef de la diplomatie malienne, a souligné l’importance d’une séparation ordonnée. « Les discussions doivent tenir compte de l’existence de l’AES en tant qu’acteur uni », a-t-il déclaré, insistant sur la nécessité d’une « coexistence pacifique » avec la Cédéao.

Les trois États se disent prêts au dialogue pour répondre aux « préoccupations des populations et de leurs États ». Malgré leur retrait, ils réaffirment leur attachement à l’idéal panafricain et leur volonté de maintenir des liens de solidarité avec les peuples ouest-africains.

Le ministre malien a reconnu les défis actuels auxquels font face les pays de l’AES, tout en saluant la résilience de leurs populations qui « restent debout » face aux adversités.
Cette réunion marque une étape décisive dans la restructuration des relations régionales en Afrique de l’Ouest, l’AES s’imposant comme un nouvel acteur dans le paysage diplomatique.

assimi

La CEDEAO officialise la fin de son depart au 29 janvier 2025

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) met fin à l’appartenance du Mali à l’organisation régionale. À compter du 29 janvier 2025, la République du Mali ne fera plus partie de cette institution, une décision prise lors de la 66ᵉ session de la CEDEAO tenue à Abuja, au Nigeria, le 15 décembre 2024.

Un communiqué officiel, adressé au ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale malien, précise que le retrait du Mali s’inscrit dans les dispositions de l’article 91 du traité révisé de l’organisation. Ce texte encadre les conditions de sortie d’un État membre.

Dans son communiqué, la CEDEAO souligne que la Conférence des chefs d’État et de gouvernement a donné mandat au président de la Commission, Oumar Alieu Touray, pour engager les formalités nécessaires à cette séparation historique. Une réunion technique entre les représentants de la CEDEAO et les autorités maliennes sera organisée pour encadrer les aspects pratiques de cette transition.

Selon les termes du document signé par le président de la Commission, les discussions concerneront des questions administratives et institutionnelles liées à la sortie officielle du Mali. La date exacte de cette rencontre doit encore être fixée.

Le retrait du Mali s’inscrit dans une dynamique plus large. Aux côtés du Burkina Faso et du Niger, le pays a annoncé en 2024 la création de « l’Alliance des États du Sahel (AES) » , un nouveau regroupement sous-régional visant à promouvoir une vision alternative à celle portée par la CEDEAO. Ce trio de pays affiche un discours de rupture avec les valeurs et orientations stratégiques de l’organisation ouest-africaine.

Un tournant pour la CEDEAO et l’Afrique de l’Ouest

La sortie du Mali soulève de nombreuses interrogations quant à l’avenir de la coopération régionale en Afrique de l’Ouest. La CEDEAO, créée pour renforcer l’intégration économique et politique de ses membres, se retrouve face à des défis inédits liés aux divergences internes et à l’émergence de nouvelles alliances régionales.

Pour le Mali, ce départ marque un repositionnement stratégique. À travers l’AES, le pays ambitionne de promouvoir une coopération centrée sur les enjeux spécifiques du Sahel, notamment la sécurité, le développement et la souveraineté régionale.

 

L’officialisation du retrait du Mali le 29 janvier 2025 constitue ainsi une étape décisive dans la recomposition des équilibres géopolitiques de la région. Reste à voir si ce nouvel ordre contribuera à apaiser les tensions ou à exacerber les divisions.