Barrick Gold au Mali : Entre croissance des réserves et tensions politiques, l’avenir incertain de Loulo-Gounkoto

Barrick Gold, géant minier canadien, renforce sa présence en Afrique avec cinq mines d’or clés, dont le complexe malien Loulo-Gounkoto, au cœur d’un litige croissant avec les autorités de Bamako. Alors que la production africaine de Barrick a atteint 1,5 million d’onces en 2023, dont 36 % provenaient de Loulo-Gounkoto, les réserves du groupe dans la région Afrique et Moyen-Orient ont continué de croître, passant de 17,69 millions d’onces en 2022 à 19 millions en 2024 11. Cette augmentation repose en grande partie sur l’extension des gisements à haute teneur de Yalea, un puits souterrain du complexe malien, dont les réserves sont passées de 6,7 à 7,3 millions d’onces entre 2022 et 2024, avec une teneur en or améliorée à 4 g/t 11.

Un actif stratégique sous pression politique

Le Mali, qui abrite plus d’un tiers des réserves africaines de Barrick, est désormais le théâtre d’un bras de fer entre le gouvernement et la multinationale. Depuis 2023, Bamako exige une révision des termes du partenariat, réclamant une augmentation de sa participation dans Loulo-Gounkoto de 20 % à 30 %, conformément au nouveau code minier adopté en 2023 11. Le ministre malien des Finances, Alousséni Sanou, a menacé de ne pas renouveler le permis d’exploitation de la mine, qui expire en 2026, si Barrick refuse d’appliquer ces modifications 11.

Cette tension s’est exacerbée en janvier 2025 lorsque les autorités maliennes ont saisi près de 3 tonnes d’or (évaluées à 245 millions de dollars) sur le site de Loulo-Gounkoto, invoquant des arriérés fiscaux présumés de 5,5 milliards de dollars – un montant faramineux que Barrick conteste vigoureusement 814. En réponse, la société a suspendu ses opérations dans le pays, une décision qui pourrait réduire ses bénéfices de 11 % en 2025 selon les analystes.

Négociations tendues et enjeux régionaux

Les pourparlers, repris fin janvier 2025 après des semaines de blocage, visent à résoudre ce conflit qui s’inscrit dans une tendance régionale : les gouvernements ouest-africains, notamment au Mali, au Burkina Faso et au Niger, renégocient activement les contrats miniers pour accroître leurs revenus, profitant des prix élevés de l’or 8. Barrick, qui nie toute dette fiscale, affirme avoir versé 85 millions de dollars en octobre 2024 dans le cadre des négociations et plaide pour un règlement amiable.

Cyril Mutombo, directeur pays de Barrick en RDC, présent à Mining Indaba 2025, a réaffirmé les efforts de la compagnie pour « progresser vers une résolution » tout en soulignant l’importance de la paix pour les investissements miniers 11. Mark Bristow, PDG de Barrick, a rappelé que le groupe collabore avec le Mali depuis 30 ans et que les différends passés ont toujours été résolus par le dialogue 4.

Implications économiques et perspectives d’avenir

La situation reste fragile. L’application du nouveau code minier malien réduirait la participation de Barrick dans Loulo-Gounkoto à 75 %, avec 5 % supplémentaires réservés aux investisseurs locaux 11. Cette restructuration pourrait affecter les réserves déclarées par la société, actuellement calculées sur une base de 80 % de participation 11. Par ailleurs, la suspension des exportations d’or depuis novembre 2024 et l’insécurité persistante dans l’Est du pays ajoutent une pression supplémentaire sur les opérations.

Malgré ces défis, Loulo-Gounkoto reste un pilier de l’économie malienne, ayant contribué à hauteur de 278 milliards de FCFA (433 millions de dollars) à l’État en 2023. Sa fermeture prolongée menacerait non seulement les finances publiques, mais aussi des milliers d’emplois locaux.

Un équilibre à trouver entre souveraineté et partenariat

Alors que Barrick mise sur l’automatisation et les énergies vertes pour moderniser Kibali (RDC), son avenir au Mali dépendra de sa capacité à concilier les exigences de Bamako avec la viabilité de ses investissements. La résolution de ce conflit sera un test clé pour les relations entre les multinationales minières et les États africains, dans un contexte où la quête de souveraineté économique s’intensifie. Comme l’a déclaré Mark Bristow, « c’est dans la paix que nous partageons les richesses » – un mantra qui devra guider les deux parties pour éviter un effritement mutuellement dommageable 11.

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