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Sénégal : depuis Dakar, la start-up Paps se fait une place dans la logistique ouest-africaine

Créée par les jeunes entrepreneurs Bamba Lo et Rokhaya Sy, le spécialiste des livraisons a ouvert son tour de table aux investisseurs pour financer sa montée dans la filière de transport.

 

Fondée en 2016, Paps était à l’origine une application de livraison à la demande, mettant en relation clients et livreurs, pour l’acheminement express d’une pizza ou d’un trousseau de clés, par exemple. « Deux ans plus tard, nous avons commencé à offrir des services de transport et de logistique taillés pour les entreprises », explique Rokhaya Sy, cofondatrice avec Bamba Lo de la start-up sénégalaise.

 

Paps version 2022 emploie une centaine de personnes et dispose d’une flotte de 500 véhicules partenaires. Parmi ses 200 à 300 utilisateurs réguliers, on trouve des industriels dont l’opérateur Orange, des médias, des banques, des entreprises de e-commerce…

 

Une levée de fonds de 4,5 millions de dollars

Déjà implantée au Sénégal et en Côte d’Ivoire, la start-up veut s’étendre en Afrique de l’Ouest, où le marché de la logistique, selon ses fondateurs, représenterait quelque 3 milliards de dollars. Pour ce faire, Paps, qui indique avoir doublé son volume d’activité entre 2020 et 2021, a récolté 4,5 millions de dollars lors d’une levée de fonds menée en janvier avec la société de capital-risque 4DX Ventures et Orange-Sonatel.

Positionnée sur plusieurs segments de la logistique, comme le stockage, le transport national et international (par voie aérienne, terrestre et maritime) et la livraison au dernier kilomètre, la start-up entend assurer « le chargement du début à la fin », indique Rokhaya Sy, ingénieure en génie logiciel de l’École nationale supérieure d’électronique, informatique et de radiocommunications de Bordeaux. L’an dernier, Paps a réalisé plus de deux millions de livraisons dans ses deux pays d’activité mais aussi à l’international.

 

Jeune Afrique

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Électricité : « Il faut ouvrir le secteur aux privés…»

Pourquoi la Guinée exporte-t-elle de l’Énergie alors que certaines de ses villes sont dans le besoin ? Quelles solutions le Gouvernement compte-t-il envisager pour améliorer la chaîne de distribution de l’énergie ? Interrogé ce jeudi 17 octobre par un journaliste d’Africaguinee.com, le Ministre de l’Énergie, de l’Hydraulique et des Hydrocarbures, Aboubacar Camara a levé un coin du voile sur les raisons et évoqué quelques mesures.

« On n’a pas de lignes de transports. On a deux choix : soit on verse l’eau, on perd des dollars ou on vend cette énergie excédentaire à un pays pour investir l’argent dans les lignes de transport », explique le ministre Aboubacar Camara.

L’électricité existe mais nous n’avons de lignes de transports vers l’intérieurprécise-t-il. Le Ministre de l’Énergie, de l’Hydraulique et des Hydrocarbures annonce que le Gouvernement va ouvrir le secteur de l’énergie aux privés qui vont investir pour construire des lignes de transport.

« Les lignes de transport de l’extérieur qu’on a, ce sont des projets intégrés sous-régionaux (la ligne de l’OMVS, la ligne de l’OMVG…) Guinée, Mali, Sénégal, Guinée Bissau, Gambie qui font qu’on a Linsang ici pour la distribution. Aujourd’hui on est en train d’ouvrir le secteur de l’électricité au secteur privé. L’Etat ne peut pas tout faire, donc on trouve des particuliers, des opérateurs et des entreprises qui vont construire les lignes. 

Quand ils font les lignes, ils se font rembourser à travers le transport d’énergie. Les lignes par lesquelles on exporte le courant au Libéria, au Sénégal ou en Gambie ne nous appartiennent pas, on fait partie du cercle des réseaux. Mais le transport de ce courant vers ces pays, les lignes qui sont réalisées, il y a des montants de redevances à payer. 

Donc, on veut des privés qui vont réaliser la boucle de Guinée permettant aux populations qui sont aujourd’hui sous thermiques d’avoir l’électricité. Il faut revoir un peu tout le système (…). Il faut ouvrir le secteur aux privés, il faut aller vers des contrats BOT (Build-operate-transfer), c’est possible aujourd’hui. », a annoncé le ministre de l’Énergieexpliquant que l’Etat est arrivé à un niveau où il a d’autres priorités. « Il ne peut pas investir 400 millions de dollars chaque année pour subventionner l’énergie », a lancé Aboubacar Camara.

Oumar Bady Diallo 

energie 2nd

La dénomination des navires de support affrétés pour opérer autour du gisement transfrontalier de gaz Grand Tortue Ahmeyim (GTA), partagé entre le Sénégal et la Mauritanie, a provoqué une mini-crise diplomatique entre les deux pays.

Une crise diplomatique latente est apparue entre le Sénégal et la Mauritanie au sujet de la nomination des navires qui doivent intervenir sur la plateforme du gisement gazier de Grand Tortue Ahmeyim. Selon nos confrères d’Africa Intelligence, Dakar et Nouakchott ne sont pas parvenus à un accord concernant les noms des navires de support, c’est-à-dire des bateaux de soutien aux opérations pétrolières affrétés autour de ce gisement transfrontalier.

Au départ, cela semblait être une tâche anodine : baptiser quatre navires de soutien fournis par le consortium Kotug/Maritalia pour les partenaires du champ gazier GTA, exploité par BP en partenariat avec Kosmos Energy et les compagnies pétrolières nationales du Sénégal, Petrosen, et de la Mauritanie, la Société mauritanienne des hydrocarbures (SMH).

Début août, chaque partenaire du consortium a eu la possibilité de nommer l’un des navires. BP a proposé le nom de « Waalo », en référence à la région située à l’embouchure du fleuve Sénégal. Kosmos a choisi « Chamama », nom d’une zone située à 60 km au nord-est de Saint-Louis, qui abrite l’un des plus grands parcs ornithologiques du monde. Cependant, Petrosen a opté pour « Talatay Nder », en référence à un village sénégalais chargé d’une histoire douloureuse

Le choix de ce nom par Alioune Guèye, le nouveau directeur général de Petrosen Holding, a provoqué la colère de Nouakchott. En wolof, « Talatay Nder » rappelle un événement tragique survenu en mars 1820 dans le village de Nder, près de la frontière avec la Mauritanie. Une troupe de Maures venus du nord du fleuve Sénégal, dans l’actuelle Mauritanie, avait tenté de capturer les femmes du village pour les réduire en esclavage. Refusant de se soumettre, les femmes de Nder avaient choisi de se suicider ensemble, un sacrifice qui est encore commémoré chaque mois de novembre.

Lorsque la partie mauritanienne a appris le nom choisi par Petrosen, elle s’est sentie offensée et a décidé de changer sa proposition initiale en « Bilad Chinguetti », qui signifie « le pays des Maures ». Les autorités mauritaniennes ont été profondément troublées par le choix du Sénégal, jugeant cette référence historique inappropriée.

Pour éviter une escalade diplomatique, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko et le président Bassirou Diomaye Faye ont pris contact avec Nouakchott durant la semaine du 8 septembre, afin de désamorcer la situation. Les deux pays ont tout intérêt à maintenir de bonnes relations diplomatiques, notamment dans le cadre des négociations en cours avec la société pétrolière britannique concernant les coûts de développement de GTA. Ces coûts ont presque doublé depuis le lancement du projet et ont été contestés lors d’un audit réalisé en avril à la demande des autorités mauritaniennes. Le Sénégal et la Mauritanie devront collaborer pour renégocier ces coûts avec BP.

 Modou Mamoune Tine 

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Ce projet s’est invité dans la campagne, car peut-être emblématique des difficultés de gestion et les attentes qui entourent ces grands projets énergétiques. Les découvertes pétrolières et gazières sont promesse de recettes fiscales et de redevances. Mais les premiers litres de gaz prévus pour avril 2022 ne sortiront finalement de terre qu’aux alentours du 3e trimestre 2024.

La production annuelle de GNL attendue pour cette 1ʳᵉ phase est de 2,5 millions de tonnes, essentiellement destinée à l’exportation dans un contexte géopolitique très favorable.

Cependant, alerte Papa Daouda Diene, analyste économique au Natural Resource Governance Institute, ces rentrées prévisionnelles doivent être considérées avec précaution. Car les retards pris dans le lancement du projet pourraient avoir des conséquences économiques importantes, notamment pour le budget de l’État. « Il ne faut pas oublier que des affectations avaient été prévues dans le budget de 2023 par exemple au niveau des fonds de stabilisation, des fonds intergénérationnels, souligne l’analyste. Mais également, ils peuvent avoir des impacts sur les prévisions de croissance et les prévisions d’endettement, ça, c’est au niveau macroéconomique. »

« Se prémunir des risques associés à ces retards »

Des retards qui peuvent avoir également des impacts sur les perspectives économiques. Le FMI en fin de mission en septembre 2023 évaluait les perspectives de croissance du PIB à 8,8% pour 2024. Une croissance qui sera stimulée en cas de démarrage de la production de pétrole et de gaz, précise l’institution. « Pour se prémunir de ces risques associés à ces retards, le gouvernement doit faire preuve de prudence dans la planification de l’utilisation de ce gaz, des emprunts associés, de l’utilisation des revenus, etc. », précise encore Papa Daouda Diene.

Le coût estimé de la Phase 1 du projet gazier était estimé à 3,6 milliards de dollars. Mais les retards de mise en service vont entraîner de fait des surcoûts. « Quand on connait un retard, il y a forcément de nouveaux investissements et le coût va augmenter, pointe Babacar Gaye, économiste spécialisé dans les questions pétro-gazières et consultant au cabinet DG Link. Il y a des surcoûts, il y a des surfacturations. BP va récupérer l’argent dépensé avant de parler de bénéfices. Du coup quand est-ce qu’on va amortir ? »

Les montages financiers de ce genre de projets sont complexes et évoluent au fil du temps et des phases d’exploitation. Le ministre du Pétrole et des Énergies sénégalais, Antoine Félix Diome a rappelé certaines modalités à l’occasion d’une conférence de presse conjointe avec son homologue mauritanien à Nouakchott en janvier dernier. « Au début, nous ne mettons pas d’argent. C’est-à-dire que l’opérateur arrive, il y a une décision finale d’investissement qui est arrêtée après le plan de développement de l’unité qui annonce le coût, détaille le ministre. Après avoir engagé toutes les dépenses, c’est à partir de ce moment, quand [l’opérateur] récupère les dépenses qu’ils ont mises, qu’on se partage le « profit oil ». »

Renégocier les contrats ?

Le « cost oil » est donc le coût pétrolier, « qui d’ailleurs doit être arrêté à un certain montant. Il ne peut pas aller indéfiniment. D’où l’intérêt de bien surveiller le cost oil », précise-t-il encore. Face à ces retards importants, les autorités ont indiqué lancer un grand audit pour notamment évaluer ces surcoûts. Un exercice de transparence également vivement attendu par la société civile. « Je pense que ce sera le plus grand dossier pour le prochain gouvernement, estime le spécialiste Babacar Gaye. C’est pourquoi aujourd’hui, vous pouvez constater que dans l’arène politique, à ce moment de la campagne, certains candidats ont promis aux Sénégalais de renégocier les contrats, parce que ce à quoi nous sommes en train d’assister n’augure rien de bon pour l’avenir de l’exploitation du gaz au Sénégal. »

Les difficultés à voir mis en service durant la première phase inquiète. Les phases 2 et 3 de Grand Tortue – censées être plus tournées vers le marché local et plus rémunératrice pour les États – sont prévues. Mais les surcoûts, les reports, mais également la politique générale de BP — notamment ses engagements à réduire ses investissements dans les hydrocarbures — crée de l’incertitude autour de l’avenir du projet.

Charlotte Cosset

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Guinée: accord crucial sur les infrastructures pour l’exploitation du méga gisement de fer de Simandou

Pour le général Mamadi Doumbouya, depuis bientôt trois ans à la tête du pays, c’est l’un des futurs moteurs de la transformation de la Guinée : le projet de mine de fer de Simandou vient de franchir une nouvelle étape.

Ce 22 juillet 2024, ses promoteurs ont annoncé un accord sur la construction des infrastructures, dont les chantiers ont déjà commencé. Objectif, une entrée en production en 2025.

En juin, le géant de l’acier chinois Baowu, le minier australien Rio Tinto, et leurs partenaires, ont bouclé le contrat de financement du projet Simandou : plus de 15 milliards de dollars pour extraire le fer du gisement encore inexploité le plus riche au monde, dont l’État guinéen détient 15 %.

Plus de 600 kilomètres de voies ferrées, 206 ponts, 4 tunnels

Une étape décisive qui leur a permis lundi d’annoncer la signature d’un accord répartissant entre eux la construction des infrastructures indispensables à l’évacuation du minerai : plus de 600 kilomètres de voies ferrées, 206 ponts, quatre tunnels, depuis les mines dans le sud-est du pays jusqu’à l’embouche du fleuve Morébaya.

Baowu et ses associés réaliseront 552 kilomètres de voies ferrés et un port permettant de charger le minerai sur des barges. Côté Rio Tinto, le minier et ses co-investisseurs poseront 70 kilomètres de rails, auxquels s’ajoute la construction d’un port de transbordement pour faire passer les cargaisons des barges vers des cargos minéraliers. 

À la fin des travaux, la propriété et l’exploitation des infrastructures seront transférées à la Compagnie du TransGuinéen, dont l’État est, avec les promoteurs du projet, actionnaire.

Mine Senegal

Le Sénégal mise sur sa stabilité, l’organisation efficace et la bonne gouvernance de l’industrie minière

Pilier du Plan Sénégal Émergent (PSE), le secteur minier représente près de 84,6 % de l’industrie extractive, selon l’ITIE. Par son nouveau code minier, le pays tente à la fois d’attirer les investisseurs, de satisfaire les revendications des communautés locales et de générer plus de valeur de l’exploitation de ses minerais. Un exercice périlleux décortiqué par Rokhaya Samba Diène, directrice générale de la Prospection et de la promotion minière du Sénégal (DPPM).

Quels selon les changements majeurs institués par le nouveau code minier du Sénégal, la loi 2016-32 adoptée il y a trois ans ?

Rokhaya Samba Diène – Parmi les innovations majeures de cette législation, nous pouvons citer la réduction de la durée de validité du permis de recherche. [Elle est fixée à 4 ans renouvelables deux fois au maximum à 3 ans pour chaque renouvellement, soit 10 ans au total, contre 12 ans dans la loi de 2003]. C’est un avantage pour le pays sachant qu’il permet de réduire le gel des permis. Auparavant, des entreprises avaient l’habitude de conserver les permis sans les exploiter à titres spéculatifs, la réduction de la durée vise à empêcher ces pratiques. Le Sénégal a aussi institué dans son nouveau code le fonds d’appui au secteur minier tiré du reversement par l’État d’un montant issu de l’exploitation pour la recherche et le développement. Le fonds devrait permettre à l’administration minière sénégalaise de procéder à des recherches pour mieux évaluer et cartographier les ressources minières disponibles. Une meilleure connaissance des ressources minières permettra à l’État sénégalais de renégocier éventuellement ses contrats et de définir des zones promotionnelles à mettre à la disposition des sociétés minières et au moment des accords de réclamer un partage de production sur ces sites. Auparavant, ce type de procédés était surtout appliqué au secteur pétrolier.

Le Sénégal a été positivement apprécié par l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Concrètement, quelles sont les dispositions prises par le pays pour créer de la valeur sur les produits d’exportation miniers ?

L’État sénégalais a essayé de réguler les redevances, en fonction du degré de transformation faite sur place, une réduction est appliquée sur la redevance de l’entreprise minière. Lorsque le minerai de fer subit par exemple une transformation au niveau local, l’État révise à la baisse la redevance appliquée. Ce sont les politiques incitatives de la nouvelle loi minière 2016-32 dont la mise en œuvre devrait s’achever d’ici une à deux années. Nous allons ensuite procéder à une évaluation de son efficacité. L’ambition du Sénégal est de créer de la valeur ajoutée sur les produits issus de l’exploitation minière. Nous voulons créer les conditions nécessaires pour la transformation locale des minerais avant l’exportation.

Dans la loi 2016-32, le Sénégal octroie un quota de la production minière aux acteurs de la bijouterie locale qui a avaient rejeté la proposition à cause de la TVA appliquée. Comment les négociations ont-elles évoluées ?

L’État avait décidé qu’une partie de l’or produit par les entreprises minières devait revenir aux acteurs de la bijouterie locale. Mais les bijoutiers ont refusé de s’acquitter de la TVA et nous sommes dans l’impasse sur ce dossier. Aujourd’hui, le Sénégal a néanmoins mis en place les comptoirs d’achats de minerais. Des entreprises ou personnes viennent s’implanter pour vendre de l’or et des substances précieuses. Leurs activités sont strictement régies par des cahiers de charges. C’est dire que les exploitants ont l’obligation de venir à ce comptoir pour vendre leurs produits et les acheteurs sont tenus acquérir l’or sur place.

De combien de comptoirs d’or le Sénégal dispose-t-il aujourd’hui ?

Actuellement, nous avons un comptoir autorisé, après l’examen de 6 à 7 demandes. Mais les artisans bijoutiers se plaignent de la longue distance à parcourir pour atteindre Kédougou [740 km de Dakar, ndlr ] la zone d’exploitation aurifère. Ils évoquent  aussi des problèmes de sécurité au cours du transport du minerai. Nous nous étudions donc  la possibilité de rapprocher les comptoirs d’or des grands centres urbains. Nous essayons aussi de voir ce qui se fait dans la sous-région africaine à ce niveau. Le ministère échange avec d’autres entités de la sous-région pour partage son expérience et étudier les modèles existants afin d’adapter au niveau local des modèles qui marchent ailleurs, si nécessaire.

Kédougou, principale région aurifère du Sénégal, a été le théâtre de troubles, de tensions entre les autorités et les communautés locales. Comment l’État sénégalais a-t-il procédé pour calmer ou satisfaire les revendications ?

Dans toutes les zones d’activités minières, nous avons le programme social minier qui est une forme de RSE que l’État avait développé en collaboration avec les sociétés minières, les communautés, les administrations concernées. Il a nécessité le recueil de l’avis des communautés locales quant à leurs besoins prioritaires. Par la suite, nous avons développé notamment des activités génératrices de revenus pour les femmes, installé des moulins, et développé des infrastructures sociales de base et offert des bourses. Un plan quinquennal financé par les entreprises minières qui a bien marché. D’ailleurs quand l’exploitation du Zircon a commencé à Diogo [région de Thiès, à 70 km de Dakar, ndlr], ils se sont inspirés de ce plan social minier. L’État dans son code minier a aussi institué le fonds de péréquation et d’appui aux collectivités locales équivalant à 20% des redevances qui vont dans les budgets des collectivités sous forme d’équipements. La loi de 2016 stipule également que 0,5% du chiffre des sociétés ira à la collectivité directement impactée.

D’autres pays de la sous-région comme le Niger ont pris des dispositions similaires dans leurs codes miniers. Mais dans la réalité, les communautés locales peinent à bénéficier de ces montants. Qu’en est-il du Sénégal ?

Les redevances sont reversées au ministère des Finances. L’arrêté est pris pour instituer le montant et c’est au ministère des Finances de faire le reversement. Nous avions rencontré des problèmes dans la répartition du fonds de péréquation qui doit être réparti au prorata des populations. Au niveau du département, nous réfléchissons sur une révision de ce décret. Selon le texte actuel, une communauté directement impactée peut être faiblement dédommagée, car compensée au même titre que le reste des populations. Cela a été institué par la loi de 2003.  Le fonds de péréquation est destiné à l’équipement des collectivités, mais il ne s’agit pas des sommes d’argent à distribuer. Pour le cas de la région aurifère de Kédougou, le dernier rapport ITIE a d’ailleurs détaillé les sommes distribuées en matière d’appuis sociaux.

Le Plan Sénégal Émergent (PSE) a consacré une bonne partie de ses projets aux industries extractives. Quelle est la stratégie mise en place par le pays pour attirer les investisseurs de l’industrie minière ?

Le Sénégal a déjà l’avantage d’être un pays stable. Ensuite, nous avons mis en place trois nouvelles Directions, notamment la Direction des mines et de géologie chargée de l’instruction des dossiers et de la délivrance des titres miniers. Puis la Direction du contrôle et de surveillance des opérations minières s’occupe du suivi et du contrôle de terrain et nous avons une Direction de la prospection et de la promotion minière qui représente le pays dans des événements promotionnels et fait valoir les atouts de la destination. Nous travaillons sur les outils de promotions et organisons un salon international des mines tous les deux ans qui attire un public considérable. La prochaine édition est attendue en 2020 et nous assistons à des salons internationaux et de la sous-région notamment en Mauritanie, au Mali, en Guinée, au Burkina Faso où nous faisons la promotion du secteur. Le Sénégal a aussi mis en place un cadastre minier pour délimiter et consigner les différents titres miniers qui entre dans le cadre de la bonne gouvernance de ce secteur. Globalement, le Sénégal mise sur la stabilité, l’organisation efficace et la bonne gouvernance de l’industrie minière.

Maimouna Dia

Mines

Le Mali octroie un permis minier de 10 ans pour la mine d’or Sadiola

Le permis d’exploitation octroyée en 1994 pour la mine d’or Sadiola est arrivé à expiration le 1er août 2024. Après 171 007 onces livrées en 2023, la mine peut produire en moyenne 200 000 onces d’or par an jusqu’en 2028 et 300 à 400 000 onces par an à long terme.

Au Mali, le Conseil des ministres du 9 octobre a adopté un projet de décret portant renouvellement du permis d’exploitation de la mine d’or Sadiola. Valable 10 ans, la licence autorise une filiale du canadien Allied Gold à poursuivre la production sur cette mine qui a livré 171 007 onces en 2023.

L’octroi du permis minier intervient après la signature en septembre d’une nouvelle convention de partenariat entre le gouvernement et la compagnie canadienne. Le mois dernier, Allied Gold a indiqué dans un communiqué que la collaboration est désormais régie par le nouveau code minier malien. Cela implique notamment une participation maximale de 30 % pour le gouvernement et la possibilité pour les investisseurs locaux de prendre jusqu’à 5 % d’intérêts dans Sadiola.

« Le gouvernement a entamé des réformes du secteur minier qui ont conduit à une revue de toutes les conventions minières en phase d’exploitation pour un meilleur partage de la rente minière. Cette revue a concerné également les pratiques opérationnelles […] de Sadiola et leur conformité à la règlementation en vigueur en matière de transaction financière », indique le communiqué du Conseil des ministres.

Avec les mines d’or Nampala appartenant à Robex Resources et Fekola de B2Gold, le gouvernement prévoit que Sadiola devrait rapporter 245 milliards FCFA (410 millions $) de revenus annuels supplémentaires au Mali. Exploitée depuis 1997, la mine devrait également contribuer à la production d’or sur les 10 prochaines années. En 2024, Allied Gold prévoit produire 195 000 à 205 000 onces à Sadiola, 200 000 onces en moyenne par an jusqu’en 2028 et 300 à 400 000 onces en moyenne par an à long terme. Sa durée de vie actuelle atteint 19 ans.

Emiliano Tossou

Afrique rotated

Guinée : Le nouveau plan des autorités pour « mettre fin » aux crises sociales

CONAKRY-Alors que depuis des années la Guinée est confrontée à des crises sociopolitiques latentes, le Gouvernement de transition veut y mettre fin. Pour ce faire, il vient de développer un nouveau plan qu’il entend déployer très prochainement pour, dit-on, la « stabilité sociale ».

 Appelé « pacte de stabilité sociale », ce projet présenté ce mercredi 16 octobre 2024 est chapeauté par le ministère du Travail et de la Fonction publique, a appris Africaguinee.com.

Il vise, selon le Gouvernement à « sensibiliser » et à « remobiliser » les acteurs du monde du travail en faveur de la stabilité, de la croissance et du progrès social en cette période de transition.

Pour François Bourouno, Ministre du Travail et de la Fonction Publique, le pacte de stabilité est un outil de « bonne gouvernance » dont la Guinée a besoin pour évaluer les actions salvatrices déjà entreprises par le Gouvernement.

Il sollicite l’accompagnement et le soutien de toutes les structures de l’administration et des partenaires sociaux, pour aboutir dans les meilleurs délais à l’élaboration et à la signature de ce pacte. L’objectif est de soustraire définitivement la Guinée des sempiternelles crises sociales, dans lesquelles elle a été longtemps engluée.

« L’histoire de notre pays nous impose d’adopter une vision à long terme », a indiqué le Premier ministre qui observe que le dialogue nécessite une flexibilité et un compromis pour trouver un espace où tout peut être possible dans la paix et le progrès.

Amadou Oury Bah a plaidé pour l’institutionnalisation du dialogue social pour permettre à la société guinéenne d’évoluer dans la paix, en tenant compte des revendications qui peuvent être gérées de manière intelligente.

Politique 1 1

l’opposition dénonce une transition « sans fin »

Plus de trois ans après la chute du président Alpha Condé, du coup d’état orchestré par les forces spéciales guinéennes et de la prise du pouvoir du colonel Mamady Doumbouya le 5 septembre 2021, l’incertitude et les inquiétudes persistent face à la multiplication des dérives autoritaires et à l’absence de calendrier électoral en Guinée.

Fodé Baldé membre de l’opposition dénonce le non-respect de la charte de transition : « Eu égard à ce qui nous a été servi le 5 septembre 2021 , à ce que nous vivons aujourd’hui on peut dire que les promesses n’ont pas été tenues entre autre en terme de respect des droits de l’Homme, en terme d’engagement pour le retour à l’ordre constitutionnel, on est à même de dire que les promesses n’ont pas été tenue dans leur globalité. »

La décision de transférer le pouvoir à un gouvernement civil élu avant la fin de l’année 2024 avait été annoncée par le président de la transition, Mamady Doumbouya à l’issue de négociations avec la CEDEAO en octobre 2022. Mais le nouveau Premier ministre Bah Oury a lui évoqué un report de la transition vers 2025.

« Nous croyons à ce que le Général Mamady Doumbouya respecte ses engagements et qu’il ne va pas prêter une oreille attentive aux sirènes qui voudraient qu’il se maintienne au pouvoir, parce que ceux qui ont tenté cette aventure, on sait où ils se trouvent aujourd’hui. », a ajouté Fodé Baldé. 

Un autre sujet d’inquiétude en Guinée c’est l’insécurité. Le 27 septembre dernier, les autorités militaires ont nié les coups de feu entendus à Conakry, les qualifiant de rumeurs folles totalement fabriquées. Cependant, pour cet opposant, un climat de peur règne dans le pays.

« Aujourd’hui la peur est à Conakry, à l’entrée de Kaloum vous verrez des dispositifs, des chars qui ont été achetés, j’ose croire que ces dispositifs sont pris pour prévenir toute éventualité de menace terroriste. Mais il y a des signes qui ne trompent pas. Pendant le défilé de l’indépendance de la Guinée le 2 octobre, le seul corps qui avait les armes chargé, c’était les forces spéciales. » a indiqué l’opposant guinéen. 

L’opposition en Guinée dénonce des entraves à la liberté d’expression et des cas d’enlèvements.

Laetitia Lago Dregnounou

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Coups d’État, pandémie et guerre en Ukraine : quels impacts sur la gouvernance en Afrique  ?

Le 25 janvier dernier, la Fondation éponyme du tycoon soudano-britannique Mo Ibrahim révélait l’indice de la gouvernance africaine 2022 (IIAG). Le continent enregistre un recul démocratique, sur fond de défis sécuritaires, d’insécurité alimentaire et de crispations énergétiques. Les crises successives menacent dix ans de progrès en matière de gouvernance africaine.

« L’IIAG 2022 souligne que la gouvernance africaine a stagné depuis 2019. Si nous ne remédions pas rapidement à cette tendance inquiétante, les années de progrès dont nous avons été témoins pourraient être perdues, et l’Afrique ne sera pas en mesure d’atteindre en temps voulu les Objectifs de développement durable (des Nations unies) ou ceux de l’Agenda 2063 (de l’Union africaine). Notre continent est exposé de manière unique aux conséquences convergentes du changement climatique, plus récemment de la Covid-19, et maintenant de l’impact indirect de la guerre Russie-Ukraine », déclarait Nathalie Delapalme, directrice exécutive de la fondation Mo Ibrahim en conférence de presse, le 24 janvier dernier.

En substance, la gouvernance africaine s’est améliorée au cours de la décennie (2012-2021). Cependant, il n’y a eu aucun progrès notable en matière de gouvernance globale depuis 2019. Au Burkina Faso, en Eswatini, en Guinée, en Guinée Bissau, au Libéria, à Madagascar, en Namibie et au Rwanda, les progrès de gouvernance ont même été interrompus à partir de la pandémie de Covid-19. L’île Maurice campe la première place des pays africains dotés de la meilleure gouvernance selon l’IIAG, en dépit d’un faible recul l’an dernier (-2,2 points), devant les Seychelles, la Tunisie, le Cap-Vert et le Botswana. Le Soudan du Sud occupe le bas du classement devant la Somalie, l’Érythrée, la Somalie, la Guinée équatoriale et la République centrafricaine.

Des coups d’État qui impactent les progrès enregistrés

La progression de l’insécurité sur le continent qui concerne 70 % de la population africaine menace les progrès enregistrés sur la dernière décennie. Entre 2012 et 2022, il y a eu 29 coups d’État à travers le monde (tentés ou réussis), dont 23 en Afrique, en particulier dans la région du Sahel. En 2012, le président Amadou Toumani Touré dit « ATT », était évincé du pouvoir suite à un putsch militaire. En mai 2012, un contrecoup d’État échouait au Mali.

En août 2018, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) était réélu avant d’être finalement renversé en août 2020 à la suite d’un coup d’État militaire. En 2021, le président Bah NDaw est renversé à son tour et Assimi Goïta devient le Président du Mali par intérim. « L’intégrité des élections et le pluralisme politique ont reculé au Mali en dix ans -qui a connu- trois coups d’État et deux élections depuis 2012 », souligne le rapport Mo Ibrahim.

Au Burkina Faso aussi, la sécurité et la sûreté se sont singulièrement détériorées pendant la dernière décennie. Depuis le départ de Blaise Compaoré en 2014 (qui quitta le pouvoir à l’issue de soulèvements populaires), le pays des Hommes intègres a lui aussi, été traversé par plusieurs coups d’État. En 2015, un coup d’État est suivi d’un contre coup d’État. Fin 2015, ont Roch Marc Christian Kaboré devient le président du Faso. Réélu en novembre 2020, il sera renversé par Paul-Henri Sandaogo Damiba en 2022, lui-même évincé et remplacé par le capitaine Ibrahim Traoré quelques mois plus tard.

Depuis l’apparition de la pandémie de Covid-19 (2019-2022), le continent africain a été traversé par treize coups d’État, dont huit réussis. En Afrique de l’Est, les deux coups d’état survenus au Soudan ont alimenté l’instabilité politique et renforcé les tensions entre civils et militaires. « Cette situation d’attentats terroristes et de coups d’État par l’armée, compromet la paix, la sécurité et la stabilité de la sous-région », déclare Aïcha Bah Diallo, l’ancienne ministre de l’Éducation nationale de Guinée et membre du Comité du Prix MIF (Mo Ibrahim Foundation).

Quelle gouvernance après 20 ans de pouvoir ?

A ce jour, trois des cinq pays africains les moins bien notés en matière de responsabilité et de transparence sont dirigés par des Chefs d’Etat au pouvoir depuis plus de 20 ans. 
« Les pays qui ont destitué leurs dirigeants de longue date ont montré une amélioration en matière de transparence et de responsabilité, y compris l’Angola, la Gambie et Zimbabwe », indique le rapport de la fondation Mo Ibrahim 2022.

Le Zimbabwe a enregistré une progression de +5,7 points, suite au renversement du président Robert Mugabe (2017) qui avait passé près de 40 ans au pouvoir. L’Angola a progressé de +5,3, suite au départ de l’ancien président Eduardo dos Santos après 39 ans au pouvoir, et la Gambie de 5 points après le départ de Yahya Jammeh qui avait présidé le pays pendant 21 ans. La Guinée équatoriale dirigée par Teodoro Obiang Nguema Mbasogo depuis 44 ans, obtient le deuxième score le plus bas en termes de transparence et de responsabilité. Alors qu’elle bénéficie du 4e PIB africain le plus élevé par habitant, elle ne se classe que 4e en bas du classement, en matière de gouvernance globale, par l’IIAG 2022.

Enfin, l’indice de la gouvernance africaine 2022 (IIAG) indique que la pandémie de Covid-19 a accéléré les perturbations dans les pratiques démocratiques en Afrique, car elle fut maintes fois utilisée pour « justifier des violations de normes démocratiques tandis que les tendances antidémocratiques préexistantes se sont accélérées par l’introduction de mesures excessives ou en maintenant des dispositions d’urgence ».

Insécurité alimentaire et circonvolutions géopolitiques

Quelque 20,2 % de la population africaine était sous-alimentée en 2021, soit une augmentation de 3,8 % par rapport à 2017. Selon les données de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou sévère sur le continent s’élevait à 57,9 % en 2021, contre 44,4 % en 2014. L’année dernière, l’indicateur IIAG Sécurité alimentaire enregistrait son score le plus bas depuis 2012. La sécurité alimentaire a décliné dans 32 pays depuis 2012, et ce, à un rythme accéléré depuis 2017, dans une vingtaine de pays africains.

En dépit d’un tableau assez sombre, plusieurs indicateurs reflètent néanmoins des avancées significatives sur le continent. Ainsi, 43 pays africains sur 54 ont vu leur situation économique globalement s’améliorer depuis 10 ans. C’est notamment le cas pour les économies ivoirienne, angolaise, gambienne ou ghanéenne. Par ailleurs, la quasi-intégralité des pays africains a enregistré des progrès significatifs en matière d’accès à la santé et à l’éducation. Pour Nathalie Delapalme, directrice exécutive de la fondation Mo Ibrahim, « le renforcement de la gouvernance est indispensable » pour répondre aux défis exogènes liés au climat, à la pandémie de Covid-19 ou à la guerre en Ukraine, que rencontrent l’Afrique.

Marie-France Réveillard