Mali : Une nouvelle République sans partis politiques ?

Assimi Goïta

Le paysage politique malien est à la croisée des chemins. À l’issue de la phase nationale des concertations des forces vives de la nation, un bouleversement majeur a été proposé : la dissolution de tous les partis politiques existants et la limitation du nombre de partis à cinq au maximum dans la future République. Cette recommandation, radicale mais symbolique, alimente les débats sur l’avenir du pluralisme démocratique au Mali.

Une volonté de rupture avec l’ancien système

Depuis plusieurs années, de nombreux Maliens dénoncent l’inefficacité, la corruption et le clientélisme associés aux partis politiques traditionnels. Pour beaucoup, ces formations sont perçues comme des instruments de pouvoir personnel, détachés des aspirations populaires.

Dans ce contexte, les concertations nationales ont donné la parole à diverses couches sociales – autorités coutumières, syndicats, représentants de la société civile et militaires – qui semblent s’accorder sur un point : le besoin de refondation profonde du système politique malien.

Les recommandations : vers un système politique inédit

Voici les principales recommandations formulées :

  • Dissolution immédiate des partis politiques actuels ;

  • Refonte des critères de création des partis, avec un ancrage territorial, une base militante réelle et des objectifs clairs ;

  • Limitation du nombre de partis à cinq pour éviter la fragmentation politique et favoriser des projets de société cohérents ;

  • Recentrage du débat politique sur les programmes, et non sur les appartenances ethniques ou régionales.

Ces mesures visent à bâtir une nouvelle République plus structurée, plus représentative et mieux gouvernée.

Une proposition controversée

Si cette orientation reçoit un écho favorable parmi une partie de la population fatiguée des jeux politiciens, elle soulève aussi des inquiétudes. Les défenseurs du pluralisme politique craignent un glissement autoritaire, voire la mise en place d’un système fermé où la liberté d’association serait compromise.

De plus, la recommandation de nommer le colonel Assimi Goïta président pour un mandat de cinq ans renforce les soupçons d’une volonté de consolidation du pouvoir exécutif, sans passer par les urnes à court terme.

Une nouvelle République en construction

Le Mali entre donc dans une phase de transition institutionnelle cruciale. Le choix de réformer en profondeur le système des partis peut être un levier de stabilité s’il est encadré, transparent et adossé à une volonté populaire authentique. À l’inverse, mal gérée, cette transformation pourrait affaiblir la démocratie et créer une nouvelle forme d’exclusion politique.

Le débat est lancé : le Mali peut-il construire une démocratie sans partis, ou avec une version radicalement réduite de leur rôle ? Le chantier de la refondation ne fait que commencer.

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